Lectures de juin
Jul. 1st, 2024 06:45 pm![[personal profile]](https://www.dreamwidth.org/img/silk/identity/user.png)
"Le Sablier des Temps", par Jean-Claude Sadoine
Poésie, environ 150 pages. Il ne faut plus que je lise des poètes dont je n'ai jamais entendu parler, et même dont je n'ai rien lu dans une anthologie. J'avais jeté un coup d'oeil sur quelques poèmes, j'avais trouvé ça simple, honnête et charmant. Je l'ai acheté (pas cher), et quand je l'ai lu en entier, j'ai été très déçue.
Malheureusement, il y a trop de clichés, et l'écriture poétique n'est pas assez bonne pour la faire passer. Les poèmes
rimée, en particulier, me semble souvent très maladroits (mais ils sont une minorité)
L'impression d'honnêteté s'est effacée aussi quand j'ai vu l'alternance de poèmes où il blâme les "bien-pensants" et d'autres où il est extrêmement bien-pensant lui-même, surtout par rapport à sa culpabilité quand il voyage dans des pays pauvres ; il y a des moments où il blâme les cyniques et où il est extrêmement cynique lui-même. La compassion pour les enfants dans les pays en guerre tourne en misery porn, le rejet des aspects déshumanisants de la modernité tourne en "c'était mieux avant", et l'érotisme soft de ses romances réduit accidentellement les femmes qu'il aime à leurs corps.
Il reste quelques jolis passages sur la nature, quelques jeux de mots sympa.
C'est pas parce qu'on a
le coeur lourd
qu'il faut le laisser tomber.
4/10
"Alma 3 - La Liberté", par Timothée de Fombelle
Pour la catégorie "Published in 2024" du bingo r/fantasy
Roman, environ 470 pages. Le troisième et dernier tome d'une série que j'aime beaucoup sur le commerce triangulaire. On rencontre plein de personnages dont les arcs se croisent, dans un scénario d'aventure très bien construit, avec des passages très émouvants. Alma devient de plus en plus le personnage principal, avec Joseph à l'arrière-plan, ce qui est exactement ce que j'espérais. J'aime la façon dont la révolution française et la révolution haïtienne sont décrites, ce qui n'est pas le cas dans tout ce que je lis. Je l'ai lu très vite et avec grand plaisir.
Les seuls points négatifs : la romance Alma/Joseph n'a pas réussi à me happer, même après trois tomes (et j'aime Amélie/Julien, donc ce n'est pas un problème avec la romance en général), et j'ai toujours l'objection que j'avais au premier tome, à savoir que j'aurais préféré que le réalisme magique soit inspiré par les religions africaines plutôt que d'être quelque chose que l'auteur a totalement inventé.
8/10
"Poésie au féminin", compilé par Camille Weil
Anthologie poétique, environ 90 pages. Je préférais cette collection avant, quand elle était plus longue et écrite plus petite, là cela laisse un peu un goût de trop peu. L'introduction parle de différences entre les thèmes des poétesses et ceux des poètes masculins (Weil définit une poétique de l'attente), mais sans parler des raisons sociales qui ont engendré cela.
Il n'y a que des poétesses francophones, et comme c'est court cela donne un peu une impression de figures imposées. Il y a des poétesses qui, si elles n'y étaient pas, laisseraient leur siècle vide, ou demanderaient d'aller dans des endroits très obscurs. Les préférées de l'anthologiste, celles qui ont le plus de textes, sont Marceline Desbordes-Valmore et Andrée Chedid.
Je ne devrais pas me plaindre, j'aime la plus grande partie des poèmes dans cette anthologie, et je comprends pourquoi certaines poétesses et certains poèmes sont incontournable. Mais disons que ce n'est pas le recueil qui me permettra de découvrir de nouvelles poétesses (sauf Germaine Beaumont, qui était une agréable surprise). Dans les poèmes plus récents et nouveau pour moi, j'aime les choix sur Claire Goll et Anne-Marie Kegels.
7/10
"Pour les enfants des morts", par Suzanne Paradis
Environ 150 pages de poésie. C'est confirmé, j'aime beaucoup cette poétesse. J'ai du mal à dire de quoi parlent ces poèmes ; cela parle beaucoup de la nature et des terres cultivées du Canada, du pain et des fruits, et cela parle beaucoup de son propre corps, mais souvent cela semble une métaphore pour quelque chose d'impossible à atteindre, à cerner.
Le chant du règne
Le temps faiblit de ma fatigue
l'heure faillie tremble sur l'aube
je sacrerai le rêve roi
j'élèverai le roi au trône
dessus la puissante mémoire
Nous ne serons jamais les hommes
des temps amers durcis au ventre
de l'immémorialité
J'épouserai le roi. Le prince
de l'héritage aura mon nom
8/10
"Contes et légendes des arbres et de la forêt", par Maguelonne Toussaint-Samat
Contes, environ 250 pages. C'est un recueil avec un message écologique très clair, mais vieux ; les problèmes majeurs de l'époque étaient la déforestation, pas encore le changement climatique, ce qui fait que certaines parties selon lesquelles pourquoi tuer des arbres quand on peut utiliser du charbon sont un peu datées. En général, cela va un peu trop loin dans la direction "il ne faut jamais couper un arbre, quelles que soient les raisons". Une écologie plus mystique que scientifique.
Ce n'est pas que l'introduction ! Chaque conte est accompagné d'un petit message au début, incluant des faits parfois très intéressants sur la biologie des arbres, parfois tournant aux théories du complot.
IL y a des contes que j'ai beaucoup aimés ; la comparaison entre trois légendes africaines de pays différents sur le baobab fait partie de mes préférées. L'histoire de Saint-Dié et de la confrontation entre un saint ermite et les légendes paiennes étaient cool aussi, et la légende amérindienne du sequoia.
Il y en a aussi qui sont artificielles. Raconter l'histoire de Bouddha en ne gardant que les parties qui font intervenir des plantes biaise totalement le message. Celle sur Tchaikovski donne l'impression que trois anecdotes différentes et toutes intéressantes ont été rassemblées pour faire une histoir plus longue, et qui se traîne. L'mi des loups n'est pas une mauvaise histoire mais elle n'est pas sur les arbres, pareil pour la romane entre Merlin et Viviane.
Même celles qui sont bien, à cause de l'effet didactique, manquent parfois de simplicité. C'est dommage quand j'ai l'impression qu'une histoire est bonne, peu connue, et aurait pu être mieux racontée, et parfois a été volontairement modifiée pour en changer le sens. Il ne manque pas d'histoires où les arbres et les forêts sont le thème principal !
6/10
"Venomous: How Earth's Deadliest Creatures Mastered Biochemistry", par Christie Wilcox
Vulgarisation scientifique, environ 200 pages. Cela parle, avec passion, des animaux venimeux et des différents types de venins.
Neuf chapitres. Le premier est une introduction, le second parle entre autres des différentes façons de mesurer la dangerosité d'un venin, le troisième est sur les immunités naturelles de certains animaux à certains venins seulement, le quatrième sur les venins qui provoquent de la douleur, le cinquième sur ceux qui attaquent le sang, le sixième sur les venins qui commencent à digérer la cible, le septième sur les paralysants neurotoxiques, le huitième sur ceux qui influencent le cerveau plus en profondeur, et le neuvième raconte toutes les façons dont les venins peuvent être utilisés pour guérir, ce qui marche déjà, ce qui est en cours de test, et tout le potentiel pas encore exploré...
Ce n'est pas que de la chimie ! Il y a de petites anecdotes, et plein de créatures passionnantes (dont le comportement est évoqué tout autant que le venin, en fait on ne peut pas séparer les deux : ornithorynques, cobras, guêpes émeraude,
C'était très intéressant ! Un peu frustrant au niveau évolutif - l'opinion, parfaitement scientifique, de l'auteur est "même si on a de vagues idées personne ne sait avec certitude d'où viennent les venins. En général, j'aime beaucoup sa façon de séparer ce qui est de la science, et ce qui est une théorie d'un seul scientifique, qui certainement plait à l'auteur, mais elle ne fait jamais semblant que c'est prouvé ou même certain.
Attention ! Les descriptions sont détaillées ! J'ai ressenti des douleurs de sympathie au chapitre 4, et l'auteure recommande de ne pas avoir mangé avant le chapitre 6 !
Je recommande à tous les gens qui aiment la vulgarisation scientifique, ou qui s'intéressent à ce sujet en particulier.
8/10
"Magic for Liars", par Sarah Gailey
Pour la catégorie "Dark Academia" du bingo r/fantasy
Roman, environ 330 pages. Ivy est détective privée, avec une vie pas spécialement glamour. Sa soeur jumelle Tabitha, à l'adolescence, a révélé des pouvoirs magiques et est allée dans une école de magie prestigieuse, pendant qu'Ivy se sentait abandonnée.
Et maintenant, un meurtre a eu lieu dans l'université de magie où travaille Tabitha, et Ivy est chargée de l'investigation par une directrice pas très satisfaite des conclusions officielles de la police magique d'une mort "accidentelle".
L'enquête est bien faite, le genre où je n'avais pas deviné alors même que j'avais tous les indices. La relation entre Ivy et Tabitha, leur traumatisme de famille, est la partie la plus intéressante de l'histoire. Tous les autres personnages (les élèves, l'intérêt amoureux), m'ont semblé superficiels et cliché, donc j'étais un peu déçue de ce point de vue. Je sais bien que le principe est qu'une école de magie a des élèves qui ont une personnalité "normale", mais est-ce que les vrais élèves dans les vraies écoles américaines sont aussi cliché ?
7/10
"Don Juan", par Nikolaus Lenau
Une pièce de théâtre du 19e siècle, très courte (environ 50 pages), le livre n'est gonflé que parce que c'est en bilingue et avec plein de notes. Je ne suis pas certaine que ce soit fait pour être joué, ceci dit. Il y a plusieurs petites scènes, pas vraiment de direction dramatique, et le but de l'auteur est plus d'être philosophique et poétique que de raconter une histoire que le lecteur, selon toute probabilité, connaît déjà.
Dom Juan, dans cette version, est une sorte de dieu de la nature et du sexe, tout puissant, en guerre contre la monogamie, et il triomphe dans toutes ses interactions avec des femmes qui apparaissent sur scène (pas Donna Anna, mais elle est seulement mentionnée), y compris certaines où on a vraiment envie de lui flanquer des baffes. Il y a beaucoup d'intertextualité, la scène avec la statue du commandeur n'arrive pas mais est mentionnée en petite blague. Même à la fin, il triomphe, et accepte la mort avec plaisir car il a l'impression d'avoir goûté à toutes les jouissances de la terre.
Je ne l'ai pas trouvé très sympathiques, et même si les personnages féminins ont l'avantage d'avoir des personnalités très différentes, elles ne sont pas vraiment développées. La philosophie ne m'a pas satisfaite. Mais heureusement, l'écriture poétique est très belle. Ce n'est pas seulement en vers, c'est vraiment poétique.
7/10
"Pietra Viva", par Leonor de Recondo
Roman, environ 180 pages. Après la mort d'un jeune moine qu'il admirait, Michel-Ange part pour la montagne pour sélectionner les marbres pour sa nouvelle oeuvre : le tombeau du pape.
J'ai beaucoup aimé le début. L'écriture, l'homoérotisme de sa relation avec Andrea, le deuil, la création artistique et la frontière mince entre l'art et la vie. Et puis, je ne sais pas, ensuite, ce n'est pas que c'était moins bien, mais il n'y a pas eu de second souffle. Michele est un cliché de petit enfant mignon, et en y réfléchissant, ça m'a révélé un schéma plus large, qu'Andrea et la mère de Michel-Ange, deux autres personnages avec qui il a des relations hautement émotionnelles, sont aussi des gens qui n'ont pas de vraie personnalité et qu'on ne voit que par son filtre. Après le mystère sur la mort d'Andrea, pour moi, cela se finit en "tout ça pour ça", et les révélations finales sur l'art sont un peu décevantes aussi. Ca n'en fait pas un mauvais livre, loin de là, mais après le début, j'en attendais plus.
7/10
Progression : 66/52
"Risques de lecture" : Le Sablier des Temps, Venomous, Magic for Liars, Pietra Viva -> 37/26
r/fantasy : 14/25
Bonus :
"The Bugle Call" tomes 1-2, par Mozoku Sora et Higoro Toumori
Pour la catégorie "Bards" du bingo r/fantasy
Les deux premiers tomes d'un manga shounen qui en comptera probablement beaucoup. Luka a été élevé dans une famille de mercenaires, il est le clairon de la troupe. Il déteste la violence, et le monde en général qui pour lui est constitué principalement de violence, il n'aime que la musique.
Un jour, au combat, il révèle un nouveau pouvoir : il peut donner des ordres clairs aussi loin que possible. La branche qu'il a sur la tête est reconnus, il fait partie des branchus, des humains avec des pouvoirs, qui servent le Pape. Il accepte de les rejoindre, mais à une condition : qu'il soit instruit pour devenir ménestrel après la guerre. Et commence alors une campagne compliquée où son expérience en tant que mercenaire et son pouvoir lui donneront le grade de commandant.
Il y a plein de branchus avec d'autres pouvoirs, et un gros mystère sur l'origine de leurs pouvoirs. Il y a de l'ambiguïté morale où personne n'est sûr de s'il y a un camp héroïque, et aussi ce que veulent les différents camps. Cela a du potentiel. Ceci dit, je trouve le setting initial de la bande de mercenaire un peu naïf - c'est du shounen, je ne devrais probablement pas le comparer à Vinland Saga ou Berserk, mais c'est difficile de s'en empêcher. Aussi, aucun des personnages ne m'a été initialement sympathique, même Luka.
7/10